#12. Manquez-vous à votre devoir conjugal ?
La France condamnée par la justice européenne, TOP 10 des romans sur la relation conjugale, la grève du sexe racontée par Aristophane
En 2025, le manquement au devoir conjugal n’est plus une faute… enfin !
Cette semaine, l'actualité nous invite à réfléchir sur un sujet délicat : le devoir conjugal. La France vient d'être condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour un arrêt de 2019 estimant "qu'une femme qui refusait des rapports sexuels à son mari était fautive en cas de divorce" (Source Franceinfo).
Oui, vous avez bien lu ! Jusqu’à récemment, dans notre pays, refuser une relation sexuelle à votre mari pouvait être considéré comme une faute. Le “oui” que vous prononcez lors du grand jour vaut comme consentement par défaut de toutes les relations sexuelles futures avec votre époux.
Alors certes, le viol conjugal est reconnu par la loi depuis 1990. Pour autant, un arrêt de la Cour de cassation de 1997 estimait que "l'abstention prolongée de relations intimes imputées à l'épouse" était de nature à justifier un divorce pour faute.
Je vous laisse découvrir les détails de cette actualité ici.
Elle me sert de prétexte à aborder ce sujet croustillant en littérature qu’est la relation conjugale.
Un héritage juridique et culturel à questionner
Le devoir conjugal trouve ses racines dans une époque où le mariage était perçu comme un contrat économique et reproductif. Jusqu'à récemment, il impliquait une obligation implicite – parfois explicite – de rapports sexuels entre les époux, souvent au détriment du consentement.
Cette vision archaïque a heureusement évolué, mais son empreinte reste palpable dans certaines conceptions du mariage. Et lorsque justice et intimité se croisent, la tension est palpable : à quel moment une relation conjugale devient-elle une contrainte, voire une violence ?
De Lysistrata à La Source des femmes
Dans la pièce de théâtre Lysistrata d’Aristophane, écrite au Ve siècle av. J.-C., des femmes grecques, lassées des guerres incessantes, décident de faire la grève du sexe pour forcer leurs maris à négocier la paix. Ce récit humoristique mais puissamment politique illustre comment le corps des femmes a souvent été vu comme un instrument de négociation ou de pouvoir.
Je ne sais pas si Aristophane était féministe avant l’heure, il devait être avant tout pacifiste, mais j’ai été ravie de découvrir que dès le Ve siècle, on reconnaissait ce moyen de pression qu’ont les femmes. Scoop : il fonctionne encore aujourd’hui :-)
Des siècles plus tard, le film La Source des femmes (Radu Mihaileanu, 2011) reprend cette idée sous un prisme contemporain. Dans un village aride, des femmes refusent d'accomplir leur "devoir conjugal" tant que les hommes ne prennent pas leur part de responsabilité pour aller chercher l’eau à la source. Sans divulgacher l’intrigue, vous pouviez vous en douter, elle se font évidemment taper dessus par leurs maris… mais elles ne cèdent pas ! Là encore, l’intimité devient un levier de revendication.
Ces œuvres montrent que la sexualité conjugale n’a jamais été qu’une affaire privée : elle est aussi un espace où s’affrontent justice, pouvoir, et désir.
De quoi vous donner matière à réfléchir pour notre conquête commune de liberté…
Consentement et liberté dans le couple aujourd’hui
L’idée même de "devoir conjugal" s’oppose à une vision moderne et égalitaire des relations amoureuses, où le consentement est central. Dans un couple, l’intimité ne devrait jamais être perçue comme une obligation mais comme une rencontre, un échange mutuellement désiré.
Mais cette affaire récente nous rappelle que cette vision n’est pas encore partagée partout, même en Europe. Elle pose aussi une question essentielle : comment réinventer les relations conjugales pour qu’elles soient fondées sur la liberté, la réciprocité et le respect ?
Certaines féministes prônent la fin du mariage, j’en parlais dans une édition précédente.
Ce n’est pas mon cas, je ne suis pas défaitiste : je pense qu’on peut avoir une belle relation conjugale.
Mais comme je n’en croise pas beaucoup autour de moi, j’ai écrit un livre pour partager quelques enseignements sur ce qui fait un mariage heureux : Se préparer au mariage ou rectifier le cap en chemin.
Organisé autour de 10 thématiques (dont bien sûr le sexe !), le livre rassemble :
- des exercices à faire avec votre partenaire,
- des outils à adopter,
- des réflexions pour avancer,
- et des exemples humoristiques tirés de ma vie conjugale :-)
Exercice d’écriture
Pour vous échauffer, voici l’exercice d’écriture que je vous propose cette semaine.
Écrivez une lettre adressée à votre partenaire (réel ou imaginaire), où vous exprimez ce que signifie pour vous la liberté dans le couple.
Quelles sont vos attentes ? Vos peurs ? Vos rêves pour une relation où chacun est pleinement respecté dans ses désirs et ses choix ?
Comme d’habitude, si vous le souhaitez, vous pouvez m’envoyer votre texte à mathilde.desache@gmail.com
Top 10 des romans sur la relation conjugale
Pour rire, s’émouvoir ou s’indigner, voici une petite sélection de livres sur le mariage.
Mon Mari de Maud Ventura : si vous êtes passée à côté de cette pépite parue en 2021, foncez !
“Elle a la vie dont elle rêvait : une belle maison, deux enfants, l'homme idéal. Après quinze ans de vie commune, elle ne se lasse pas de dire : " Mon mari ! " Pourtant elle veut plus encore : il faut qu'ils s'aiment comme au premier jour. Alors elle s'impose une discipline de fer pour entretenir la flamme. Elle l'observe, note ses fautes, tend des pièges, le punit en conséquence. Elle est follement amoureuse de lui. Jusqu'au jour où, évidemment, elle va trop loin...”
Quatrième de couverture de Mon Mari de Maud Ventura
Ta promesse de Camille Laurens : tout juste sorti de l’imprimerie ! L’une de mes autrices préférées dépeint une relation de couple toxique qui va jusqu’au procès… une histoire inspirée de sa propre expérience ?
Une si longue lettre de Mariama Bâ : un classique de la littérature africaine, un petit bijou qui mérite d’être plus connu. La narratrice écrit une longue lettre à sa meilleure amie et compare leurs trajectoires de vie. Lorsque leurs maris respectifs ont décidé de prendre une seconde épouse, l’une va rester quand l’autre va partir.
Un amour exemplaire de Daniel Pennac et Florence Cestac : une bande dessinée tendre et émouvante où Pennac raconte l’histoire d’un couple exemplaire qu’il a connu quand il était enfant. Drôle et émouvant.
Une vie de Guy de Maupassant : dès l’enfance, les histoires pour les petites filles se terminent par le happy ending “ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants”. Dans ce classique de la littérature, Maupassant nous raconte la suite de l’histoire et ses désillussions.
Pas ce soir d’Amélie Cordonnier : l’histoire d’une femme qui “manque à son devoir conjugal”, vue par les yeux de son mari blessé par son désir enfui.
Un amour au long cours de Jean-Sébastien Hongre : sous la forme d’un roman, l’auteur nous partage les astuces qu’il a mises en place avec sa femme pour vivre un amour au long cours. Ce n’est pas de la grande littérature, mais c’est une vision très juste du couple contemporain et des défis qui l’attendent tout au long de la vie.
Mon cher mari de Rumena Bužarovska : 11 femmes se livrent sur leurs époux. “Adultère ou machiste, prétentieux ou destructeur, l’homme de chaque couple est décrit par sa compagne dans une situation quotidienne qui dévoile l’étendue de ses défauts, mais également à quel point il est difficile de vivre à deux.” Désopilant !
La femme gelée d’Annie Ernaux : que reste-t-il de nos aspirations de jeunes femmes une fois que la vie domestique de femme mariée s’impose à nous ? Mon livre préféré d’Annie Ernaux.
Le goût de la vie commune de Claude Habib : je termine par une touche positive et poétique, par un éloge de la vie à deux, à contre-courant de nos vies modernes. Un très joli petit livre !
“Je suis spontanément conjugaliste. J'apprécie que les amours durent, que les malentendus se dissipent et que les écarts se pardonnent. J'aime que les dépits se dépassent, que les séparés se retrouvent et que personne ne meure à la fin.”
Claude Habib, Le goût de la vie commune
Ma vie d’écrivain
Ma vie d’écrivain existe justement parce que j’ai d’abord misé sur la qualité de ma relation conjugale.
Et vous ? Votre mariage ou votre couple est-il un levier pour votre épanouissement et votre liberté ?
Sinon, vous savez ce qu’il vous reste à faire… commandez Se préparer au mariage ou rectifier le cap en chemin ;-)
Bonne lecture et à la semaine prochaine !
Mathilde
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