L’Académie française a récemment remis au Président de la République la 9e édition de son dictionnaire. La précédente date de 1935 et la toute première de 1694. Les Académiciens se réunissent tous les jeudis pour y travailler, mais évidemment avec 53 000 entrées, dont 21 000 entrées nouvelles par rapport à la 8e édition, cela fait du travail et prend du temps !
Et surprise… elle fait déjà polémique !
Polémique à l’Académie française
Je vous épargnerai les entrées “race” ou “négrillon” pour me concentrer sur celle qui nous intéresse plus particulièrement ici :
FEMME, n.f. : être humain défini par ses caractères sexuels, qui lui permettent de concevoir et de mettre au monde des enfants.
Quid des femmes ménopausées ou non fertiles ? Elles ne sont plus des femmes ?
Certes, la définition a évolué. Dans l’édition précédente de 1935, on avait droit à :
FEMME, n.f. : être humain du sexe féminin, la compagne de l’homme
Quel progrès ! De compagne de l’homme, nous sommes maintenant ramenées à notre capacité génitrice :-)
A la décharge des Académiciens (que je respecte et admire), les définitions sont étudiées dans l’ordre alphabétique et le premier volume de cette 9e édition du dictionnaire est paru en 1992. Leur mission est de refléter l’usage courant des mots et on peut penser qu’effectivement, en 1992, lorsqu’on parlait d’une femme dans la conversation, on parlait d’un être humain ayant un sexe permettant de faire des enfants…
Leur mission n’est donc pas facile : comment rendre compte de l’usage de la langue en la fixant… quand elle évolue de plus en plus en vite ? De surcroît, quand certains mots cristallisent des débats de société encore très sensibles ?
Alors je vous pose la question, à vous, les principales intéressées :
Qu’est-ce que c’est, être une femme ?
Je suis une femme car…
(Pêle-mêle de propositions dans le désordre)
… j’ai un pubis, un clitoris, un vagin, des ovaires, un utérus, des seins ?
… je peux tomber enceinte et mettre au monde des enfants ?
… je me sens faire partie de ce peuple, cette tribu qui se désigne sous le mot “femme”?
… je vis au rythme de mon cycle menstruel, j’alterne entre le sang et la peur de tomber enceinte, tout commence à l’adolescence et tout se termine à la ménopause
… je connais un amour immense, indéfinissable, plus fort que tout, qui s’impose à moi, le jour où je deviens mère ?
… j’ai appris à faire passer mes besoins, mes envies, après celles des autres ?
… je fais mes choix en fonction du regard des autres, et surtout des hommes ?
… je n’existe plus lorsqu’on ne me désire plus ?
… je suis l’héritière d’une histoire de soumission et d’humiliation ?
… je suis le péché du monde, fille d’Eve, coupable à jamais d’avoir arraché les hommes du jardin d’Eden ?
… je ne suis qu’un morceau de cuisse de l’homme, je lui dois tout ?
… je ne serai heureuse que lorsque j’aurai épousé le prince charmant et ma vie n’a de sens que pour ça ?
Aucune réponse n’est satisfaisante, n’est-ce pas ?
Ecrire, au féminin, c’est chercher ensemble cette définition
Parce qu’après tous ces combats,
on vit aujourd’hui dans un pays où être une femme ne limite en rien notre avenir,
(ou presque ? on y est presque n’est-ce pas ?)
parce qu’être un garçon ou être une fille ne décide plus du métier que l’on aura droit de faire, de nos rêves, des règles à respecter…
… faut-il renoncer à ce mot : “femme” ? Est-il encore utile ?
Le jour où vous pourrez dire à votre fille : “Ça ne change rien, que tu sois une femme ou un homme, trace ta voie.” Et qu’elle vous répondra : “Bah alors, ça veut dire quoi être une femme ?” Qu’aurez-vous à lui dire ? Spontanément, reviendrez-vous à la définition de l’Académie française ?
Vous aurez beau lui seriner : “On ne naît pas femme, on le devient.” (merci Simone)
Où trouvera-t-elle le mode d’emploi ?
Dans la littérature. Dans les modèles que nous lui fournirons.
Nous sommes chacune responsables
Oui, chacune de nous porte la responsabilité de vivre sa vie de telle sorte à ce qu’elle puisse inspirer les petites filles de demain dans leur quête pour devenir une femme.
Et pour celles qui le souhaitent, de l’écrire aussi.
Car au-delà d’une définition dans un dictionnaire, le mot femme recouvre autant de facettes que nous sommes justement… de femmes !
Voilà comment nous pouvons venir en aide à l’Académie française : écrivez ce que c’est pour vous que d’être une femme !
N’avons-nous pas une chance unique ?
Pour la première fois de notre histoire, la page est blanche, même les Académiciens peinent à la remplir… alors à nous de l’écrire.
Par la plume. Par nos exemples.
Soyez les femmes que vous auriez aimé avoir comme exemple enfant.
Offrez ce cadeau à la génération future.
Exercice d’écriture
Vous vous y attendiez :
Consigne :
Ecrivez ce que cela veut dire pour vous “être une femme”.
Forme libre. Exemples personnels bienvenus pour l’illustrer.
Vous pouvez m’envoyer vos textes comme d’habitude à mathilde.desache@gmail.com
Hâte de vous lire !
Conseil de lecture
J’avais commencé à vous concocter une liste des livres qui tout au long de ma vie m’ont aidée à comprendre ma condition de femme et à choisir quelle femme je serai. Mais elle est bien trop longue !
Alors je vous recommande une compilation en deux volumes de la journaliste Annick Cojean qui a interviewé des dizaines de femmes connues, de toute profession, à partir de cette formule : “Je ne serais pas arrivée là si…”
“A 25 femmes magnifiques, j’ai lancé ce petit bout de phrase, et 25 ont accepté de la poursuivre. Juliette Gréco et Christiane Taubira, l’une haïe par sa mère, l’autre galvanisée par sa mémoire. Virginie Despentes et Amélie Nothomb. Patti Smith et Marianne Faithfull. Agnès b. et Claudia Cardinale. Joan Baez et le rabbin Delphine Horvilleur. L’écrivaine turque Asli Erdogan et l’actrice britannique Vanessa Redgrave. La pianiste Hélène Grimaud, la maire de Paris Anne Hidalgo, l’avocate et prix Nobel iranienne Shirin Ebadi, la féministe Eve Ensler, les comédiennes Nicole Kidman et Dominique Blanc…”
Extrait de la quatrième de couverture du livre, par Annick Cojean
Le second volume, Nous ne serions pas arrivées là si… rassemble les témoignages de 34 autres femmes : Isabelle Autissier, Yasmina Reza, Isabella Rossellini, Mona Ozouf, Laure Adler, Gisèle Halimi, Christine and the Queens, Céline Sciamma, Nancy Huston, Françoise Hardy, Caroline Fourest, Gloria Steinem, Isabelle Carré, Barbara Hendricks, Clémentine Autain, Agnès Jaoui, Anne Sylvestre, Maryse Condé, Marjane Satrapi, Cécile de France, Élisabeth de Fontenay, Rossy de Palma, Melody Gardot, Simone Schwarz-Bart, Line Renaud, Clara Luciani, Karine Lacombe, Marie-Christine Barrault, Djaïli Amadou Amal, Marlène Schiappa, Nina Bouraoui, Emma Thompson, Mona Eltahawy.
C’est un boost d’inspiration. On sort de la lecture de ces deux ouvrages emplie de la force, de la gnak, du courage de ces femmes merveilleuses. Après, on se sent de taille à gravir des montagnes et fière d’appartenir au peuple des femmes.
Ma vie d’écrivain
– Maman, pourquoi on dort à la cave ? me demande ma fille, 4 ans.
Je vous rassure : on ne dort pas vraiment à la cave !
Mais à l’approche de l’hiver, on fait des économies d’énergie en fermant les 3/4 de la maison et en ne vivant qu’au rez-de-jardin, une sorte de grand appartement 2 pièces.
Notre consommation d’électricité est divisée par 4 et c’est bon pour la planète !
C’est aussi ça le quotidien d’écrivain : troquer du confort matériel contre du temps. Vivre autrement pour plus de liberté.
A bientôt !